Le Nexus du Docteur Erdmann – Nancy Kress

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Une sortie pas vraiment récente dans la collection Une Heure Lumière puisqu’elle date de 2016, et un prix Hugo du meilleur roman court en 2009. Nancy Kress propose, dans Le Nexus du docteur Erdmann, une intrigue géronto-science-fictive se déroulant pour 98% dans la maison de retraite médicalisée de Saint Sebastian, et pour 2% ailleurs dans l’univers.

Le docteur Erdmann du titre est une ancienne pointure de la physique américaine, qui a brillé dans sa jeunesse à Los Alamos sur le programme nucléaire américain. Désormais nonagénaire, il assure encore quelques cours à l’université locale, et passe la plupart de son temps à ruminer dans son appartement de Saint Sebastian. Henry Erdmann est légèrement acariâtre sur les bords, et assez désagréable humainement au milieu, affichant ostensiblement son mépris pour ses coturnes de la maison de retraite. Nous avons là tout un panel de personnes âgées, avec leurs problèmes de hanches, de douleurs arthritiques, de transits difficiles. Il y a Evelyn , la bavarde invétérée, Eva la vielle hippie à la recherche de ses chakras, Anna Chernov l’ancienne ballerine, et quelques autres, et aussi Carrie l’aide soignante qui se prend d’amitié pour le vieil Henry Erdmann. C’est le seul qui l’écoute lorsqu’elle se fait tabasser par son ex-mari de flic alcoolique. Lui, cela lui donne quelqu’un à haïr vraiment. Tout ce petit monde se met en place sur les 50 premières pages de ce roman de 136 pages. Mais un jour, le Dr. Erdmann subit une attaque cérébrale, faisant penser à un AVC ou une crise d’épilepsie. Une fois, puis deux. La douleur est intense et Erdmann craint pour son outil le plus essentiel, celui de tout scientifique, son cerveau. Petit à petit, il se rend compte que les autres patients les plus âgés de la maison de Saint Sebastian eux aussi éprouvent ces malaises, simultanément. Vers la page 99, les choses s’accélèrent et des événements étranges ont lieu au sein de la maison de retraite. En parallèle à ce récit, intercalé entre les chapitres, Nancy Kress nous offre de belles pages, poétiques, sur un vaisseau pensant traversant l’univers. Ces pages malheureusement n’occupent qu’une toute petite partie du texte.

J’ai un souci avec ce roman. Pendant une bonne moitié du livre, j’avais l’impression d’être dans le film Cocoon de Ron Howard (1985). Nos retraités ne sont pas très sympathiques et leurs problèmes de santé ne m’ont pas intéressé plus que ça.  Le Dr. Erdmann est surjoué dans son rôle de vieux physicien sceptique et imbu de sa personne. Nancy Kress noie le lecteur dans une averse de name-dropping de scientifiques célèbres pour appuyer sa caractérisation qui tombe dans la caricature. De plus, son style me fatigue. Fait de phrases courtes,  très marqué par la littérature américaine des années 90, se limitant à un sujet-verbe-complètement, et encore dans les moments les plus féconds. A l’inverse, l’écriture s’épanouit et se fait belle lorsqu’elle se diffuse dans le milieu interstellaire. Pour moi, le récit a choisi le mauvais point de vue. J’aurais été vraiment séduit par un renversement de composition et de perspective qui aurait donné les grandes pages de ce roman aux passages qui n’en occupent que 2%. La beauté et l’étrangeté de ces pages ne sont pas sans évoquer celles rencontrées dans la nouvelle The server and the dragon de Hannu Rajaniemi dans le recueil Engineering Infinity. C’est pour dire.

En conclusion, je ne comprends pas l’attribution du prix Hugo à cette novella.


Vous pourrez lire des critiques un peu plus enthousiastes sur ce roman chez Just a Word, L’ours critique, Nebal, VertSamuel ZitermanLe Dragon galactique, Le Bibliocosme, Au Pays des Cave trolls, Feygirl,


Livre : Le Nexus du docteur Erdmann
Collection : Une Heure Lumière (Le Bélial)
Auteur : Nancy Kress
Publication : 2016
Langue : Français (traduction d’Erwann Perchoc)
Nombre de pages : 160
Format : papier et ebook
Prix : Hugo (2009)


6 réflexions sur “Le Nexus du Docteur Erdmann – Nancy Kress

  1. The server and the dragon, carrément ? Ben merde alors… Mais bon, je suis comme toi, moi non plus je n’accroche pas du tout au style de Nancy Kress, elle me fatigue. Et ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé. Je me suis donc tenu éloigné de ce roman court. Je vois que j’ai eu raison. Merci pour ta critique 😉

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